
Grâce à l'opération «Likofi», la ville de Kinshasa a été nettoyée de ces jeunes délinquants, à l'origine de nombreux meurtres, agressions physiques et vols à main armée. A la fin de cette opération qui avait duré trois mois, la population kinoise avait poussé un ouf de soulagement, car dorénavant, on peut circuler librement dans cette grande ville, sans plus craindre d'être agressé. Plus de 900 kulunas étaient arrêtés, tandis que des milliers d'autres avaient fui, pour trouver refuge dans les provinces voisines de Bandundu et du Bas-Congo. «Likofi» avait suscité, d'ailleurs, une grande polémique, à Kinshasa, en raison des méthodes expéditives utilisées, semble-t-il, par la police, accusée d'avoir, parfois, fait passer par les armes certains jeunes arrêtés. L'Unicef s'en était vivement inquiété. La police avait démenti, reconnaissant quelques bavures dans le déroulement de l'opération.
Pourchassés à Kinshasa, certains kulunas avaient traversé le fleuve Congo, pour trouver refuge dans les quartiers périphériques de la partie Nord de Brazzaville, où ils avaient repris leurs activités criminelles. C'est ainsi que dans les quartiers périphériques des arrondissements 6 Talangaï et 9 Djiri, l'insécurité et les vols étaient devenus un phénomène qui commençait à prendre de l'ampleur. Une certaine terreur régnait dans ces quartiers et les femmes redoutaient de se retrouver dans la rue après 18h. En mars dernier, deux meurtres à Talangaï, dont le viol et l'assassinat d'une jeune dame, ont suscité l'émoi et la colère de la population qui réclamait alors une action vigoureuse de la police. Parmi les sept présumés criminels arrêtés, il y a des jeunes ressortissants de la RDC. Ce qui amènera la police à lancer une opération coup de poing, baptisée «Mbata ya bakolo». Malheureusement, le début de l'opération est entaché de bavures, à cause du mauvais comportement de certains policiers impliqués. Les ressortissants de la RDC, en situation irrégulière à Brazzaville, qui sont rapatriés chez eux, livrent des témoignages alarmants, une fois arrivés à Kinshasa, parlant même de tueries. Les médias s'en emparent et jettent de l'huile sur le feu. Le gouvernement de la RDC dépêche à Brazzaville une délégation conduite par son vice-ministre des affaires étrangères, Célestin Tunda wa Kasende. Les négociations avec le gouvernement de Brazzaville, notamment le ministre de l'intérieur et de la décentralisation, Raymond Zéphirin Mboulou, aboutissent à la mise en place d'une commission mixte, chargée de suivre l'exécution de l'opération Mbata ya bakolo, afin de prévenir les dérapages et garantir les droits des personnes rapatriées. La police congolaise met de l'ordre dans ses rangs, en punissant les policiers auteurs d'actes délictuels au cours de l'opération, et dément les exactions contre les ressortissants de la RDC.
Malgré cela, lors de la plénière du mercredi 10 avril 2014 de l'assemblée nationale à Kinshasa, certains députés de la RDC font montre d'un extrémisme injustifié, demandant même la réplique à Kinsahsa, en chassant les ressortissants du Congo-Brazzaville. Ainsi, depuis quelques jours, les Congolais du Congo-Brazzaville sont pris à partie. Plus de 600 étudiants, pourtant en règle, sont pourchassés et trouvent refuge à l'ambassade de leur pays, sans qu'une prise en charge réelle ne leur soit garantie. Certains ont déjà réussi à traverser le fleuve, pour rentrer à Brazzaville et la plus grande partie a pu le faire, samedi 26 avril. Il leur est, maintenant, exigé d'avoir un passeport et un visa d'études et se faire établir une carte de séjour, pour étudier en RDC.
Autant dire qu'à Kinshasa et à Brazzaville, on a voulu lutter contre le phénomène de grand banditisme appelé Kuluna, on se retrouve avec des incidents diplomatiques entre les deux capitales, condamnées, pourtant, à vivre en bon voisinage, comme le chantent les artistes-musiciens des deux rives. Mais, il y a lieu de reconnaître que les bavures policières, l'extrémisme de certains députés et de certains médias de la RDC ont contribué à jeter de l'huile sur le feu, dans un climat où l'on a oublié l'essentiel: la lutte contre le grand banditisme lié au phénomène Kuluna qui, semble-t-il, reprend à Kinshasa, quelques mois après l'opération «Likofi».
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